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Nos collections de cartes postales de Paris et de l’Île-de-France

La Bibliothèque historique conserve plus de 50 000 cartes postales anciennes représentant Paris et les départements franciliens. Elles ont été numérisées et sont consultables ici (pour Paris) et (pour l’Île-de-France). Ces impressions photomécaniques témoignent des rues, des bâtiments, des monuments et des modes de vie, dans la capitale et ses banlieues, depuis la fin du 19e siècle jusqu’aux années 1930.

Petite histoire de la carte postale à travers les images de Paris

Inventée en Allemagne au milieu des années 1860 et mise en place dans la plupart des pays européens entre 1870 et 1871, la carte postale naît en France avec la loi du 20 décembre 1872 qui officialise la création de ces « cartes-postes » destinées à circuler sans enveloppe. 

Magasin de cartes postales, avenue des Ternes – CPA-5331 (BHVP)

Deux modèles aux tarifs différents voient alors le jour : une carte à 10 centimes sert aux envois au sein d’un même bureau de poste ou dans Paris intra-muros, une carte à 15 centimes pour une correspondance entre bureaux éloignés. Ces bristols ne sont pas encore illustrés. Leur coût modique d’affranchissement, environ deux fois moins élevé que celui d’une lettre classique, favorise leur succès dans toutes les catégories de la population.

Quand on ne pouvait pas écrire au verso… CPA-4078 (BHVP)

Le moment de l’Exposition universelle de 1889 marque la première expérience massive d’édition de cartes postales illustrées en France, alors que ce mode de communication s’émancipe du cadre administratif. En 1900, 52 millions de cartes postales sont vendues. En 1910, ce chiffre a plus que doublé pour atteindre les 123 millions d’exemplaires en circulation1. À la fin des années 1890, la carte postale permet la démocratisation de la photographie grâce au procédé d’impression photomécanique, mis en œuvre par exemple par les frères Neurdein. Fruit de cette évolution, la législation évolue : à partir de 1904 la correspondance est autorisée au verso, quand auparavant il n’était permis d’y écrire que l’adresse du destinataire. 

Au début du 20e siècle, la carte postale devient aussi un souvenir voire un objet de collection. L’intérêt pour ce support grandit à mesure qu’elle devient un mode de communication de masse. Une presse corporative des éditeurs-imprimeurs de cartes postales voit le jour (tel le Bulletin mensuel de la Chambre syndicale française des éditeurs de la carte postale illustrée), de même que des revues d’amateurs de cartes postales illustrées (Le Cartophile) ou d’art (La Diane. Revue artistique de la carte postale).

On voit ainsi fréquemment les habitants d’un lieu poser dans leur environnement quotidien. Objet courant, elle est le témoin privilégié de l’ordinaire comme de l’exceptionnel ou du touristique, représentant souvent des événements d’actualité ou des sites prestigieux. La crue de la Seine de 1910 fut ainsi l’occasion de très nombreuses vues de l’ensemble des quartiers de Paris sous l’eau. Notre collection parisienne englobe aussi bien les vues de musées, de monuments, de statues que les images des habitants, commerçants, travailleurs des rues de Paris. Elle fait ainsi la part belle à l’évolution des modes de vie en ville au tournant du 20e siècle.

Les cartes postales franciliennes : témoins de changements historiques à l’orée du 20e siècle

Le passage du 19e au 20e siècle s’accompagne de l’industrialisation massive de Paris et de sa banlieue, mais aussi de l’affirmation du régime républicain2. Les cartes postales figurant des gares et des bâtiments des PTT (Postes, télégraphes et téléphones) sont ainsi légion, de même que celles capturant les nouvelles écoles communales et les hôtels de ville. Les nombreuses photographies de sorties d’usine témoignent d’un changement significatif dans la sociologie de ces espaces franciliens, parfois qualifiés de « banlieue rouge ». En 1924, le journaliste Paul Vaillant-Couturier va même jusqu’à écrire que « Paris, capitale du capitalisme, est encerclé par un prolétariat qui prend conscience de sa force »3.

La densification et l’urbanisation de ce territoire sont également visibles. Les cartes postales font la publicité des moyens de transports innovants comme le tramway et le train, mais aussi les ballons dirigeables ! Elles dévoilent les nouveaux lotissements, les rues pavées qui remplacent les chemins de terre, les jardins publics devenus poumons verts alors que les terres agricoles perdent du terrain.

Toutefois, ces modifications en profondeur ne doivent pas faire écran à une autre réalité : la France reste un pays agricole et la population paysanne est toujours numériquement forte. L’Île-de-France n’est pas en reste, surtout parce qu’elle assure la lourde tâche d’alimenter la capitale4. Les départements de Seine-et-Oise et de Seine-et-Marne, notamment, sont des terres d’élevage et de cultures céréalières et maraîchères. De la même façon, la société républicaine et laïque qui se construit à l’orée du 20e siècle, fait toujours la part belle à ses édifices religieux. Les églises sont un immanquable de nos ensembles de cartes postales. La diversité confessionnelle n’est guère illustrée, à l’exception notable de la synagogue de Vincennes (inaugurée en 1907).

Nos cartes postales témoignent encore de l’avènement d’une société de loisirs et de fêtes5. Et si la capitale voit fleurir les cabarets et les cafés, sa banlieue offre des divertissements plus champêtres et bucoliques. Les bords de Marne et de Seine s’habillent de guinguettes et se prêtent à la baignade. Hippodromes et casinos s’ouvrent à une clientèle bourgeoise et se démocratisent peu à peu. À Enghien-les-Bains, un casino municipal est inauguré en 1901 et son étrange physionomie – la façade sud prend la forme d’une proue de bateau qui s’avance sur le lac – attire clients et curieux, par milliers. Bals populaires, soirées musicales ou encore fêtes foraines s’organisent un peu partout en Ile-de-France, à l’image de l’emblématique fête à NeuNeu de Neuilly-sur-Seine.

Si ces cartes postales permettent de retracer l’histoire de l’Ile-de-France dans sa globalité, elles peuvent aussi nous renseigner sur des événements marquants et des lieux représentatifs de l’histoire locale. Prenons l’exemple de l’inondation de 1910, visible dans de très nombreuses cartes postales, comme à Puteaux, Gennevilliers, Alfortville, Saint-Ouen, Clichy-la-Garenne, etc. Ou encore celui du moulin d’Ivry-sur-Seine, construit aux alentours de 1680 et encore debout aujourd’hui. Au cours du 19e siècle, il cesse de fonctionner et se trouve occupé par des vanniers, ce dont témoignent ces images. Ou bien encore l’exemple des usines Pathé, installées à Vincennes en 1898. Charles Pathé étend ensuite ses unités de fabrication des films à Montreuil et Joinville-le-Pont (qui accueille aussi les studios Gaumont quelques temps plus tard).

N’hésitez pas à aller vous promener dans les rues de votre arrondissement parisien ou de votre commune francilienne, grâce à nos collections numérisées ! Pour rappel, c’est ici et . Bonnes découvertes !

  1. Serge Zeyons, “Les associations et bulletins cartophiles à la fin du XIXe et au début du XXe siècle” [en ligne], Cercle français des collectionneurs de cartes postales []
  2. Michel Giraud, Histoire de l’Île-de-France, Paris, France-Empire, 1996 []
  3. L’Humanité, “Paris encerclé par le prolétariat révolutionnaire”, 13 mai 1924 []
  4. Monique Poulot, “La métropole francilienne en agriculture” [en ligne], Pavillon de l’Arsenal, 2019 []
  5. Julia Csergo, “Parties de campagne. Loisirs périurbains et représentations de la banlieue parisienne, fin XVIIIe-XIXe siècles“, Sociétés & Représentations, 2004/1, n° 17, p. 15-50 []

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Juliette Eyméoud (24 avril 2025). Nos collections de cartes postales de Paris et de l’Île-de-France. L'échauguette. Consulté le 23 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13t78


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